Le Grand Port Maritime de Marseille enfume les habitants du Golfe de Fos

Si le plan stratégique 2013-2020 du grand port est validé en l’état le 25 mars prochain, des millions de camions circuleront bientôt sur nos routes

Le Grand Port Maritime de Marseille (GPMM) veut multiplier par 2 le trafic conteneurs d’ici 2013 et par 5 d’ici 2020. L’objectif est d’atteindre les 5 millions de conteneurs par an contre 850 000 aujourd’hui. Cela multipliera le trafic poids-lourd par 2 d’ici 2013 et par 4 d’ici 2020.

Pour accueillir ces conteneurs, le GPMM prévoit une nouvelle saignée du golfe de Fos, cette fois du côté de Port-St-Louis-du-Rhône : de nouvelles darses et des quais en pleine zone Natura 2000.

Malgré les efforts de communication déployés par le port sur les perspectives de développement des transports fluviaux et ferroviaires – qui sont contredites notamment par l’absence d’engagement formel de la part de RFF – et même si, conformément à ce que prédit le projet stratégique, le taux de prise en charge des conteneurs par les camions descendait graduellement à 60% en 2020, l’objectif des 5 millions de conteneurs devrait avoir pour conséquences de multiplier le trafic camion au moins par deux d’ici 2013 et par quatre d’ici 2020.

Et comme si le projet d’incinérateur des ordures ménagères de Marseille ne suffisait pas, le port envisage d’implanter des centrales à charbon dans la zone de Fos.

Le plus grave est que ce projet pharaonique a encore été élaboré sans aucun respect de l’environnement et des habitants de la région. On sait pourtant que le trafic poids-lourd contribue pour 24 % aux émissions de CO2 en France et est l’un des principaux responsable d’émission de particules fines cancérigènes.

Dans sa note de synthèse, le port annonce également que « les effets à court terme de la crise économique ne remettent pas en cause » les terminaux à conteneurs 3XL et 4XL, dont la construction devrait démarrer prochainement. Mais cette affirmation s’appuie sur les prévisions du FMI de janvier dernier, qui donnaient une croissance mondiale de +3% dès 2010… Lors de la réunion du G20 le 14 mars dernier, le FMI a pourtant ramené ses prévisions entre +1,5% et 2,5% (et seulement +0,1% pour la zone euro). La lecture attentive de la note de synthèse montre sur d’autres points importants le peu de fiabilité du port dans ses prévisions, avec par exemple des investissements privés d’ici à 2020 variant d’une page à l’autre de 4 à 6,9 milliards d’euros.

La vérité, c’est que le port fait des spéculations sur l’avenir que même les financiers les plus intrépides n’osent plus faire aujourd’hui et qu’il s’inscrit dans un dispositif d’un autre âge, privilégiant les grands travaux pour soutenir l’économie et l’emploi dans des secteurs à l’avenir incertain. Le GPMM poursuit des objectifs et une politique d’aménagement pensés il y a quarante ans.

Le GPMM prends une grille de lecture unique (économique) pour faire l’analyse et imaginer ses perspectives de développement. Comme l’analyse de la situation actuelle est contestable (non prise en compte de la crise économique, schémas de croissances établis en fonction des années antérieures donc aléatoires, pas d’anticipation sur la disparition des énergies fossiles…), les solutions qu’il propose le sont tout autant. Par son incapacité à saisir les enjeux environnementaux liés à la biodiversité et à la multiplication des activités polluantes, le GPMM fait preuve d’une incompétence criminelle.

L’association NACICCA questionne la pertinence de ce projet compte tenu de la crise à la fois économique, énergétique et écologique, que nous connaissons aujourd’hui. Dans un contexte de raréfaction des énergies fossiles, ce projet ne peut être porteur d’emplois pour le long terme, et accentuera, si elle ne l’était pas déjà assez, la dégradation du cadre de vie et de la santé des habitants du golfe de Fos.

C’est pourquoi NACICCA invite les élus des collectivités qui donneront leur avis le 25 mars à être cohérents avec leur engagement contre l’incinérateur et à s’opposer à ce projet inconscient. Nous les invitons également à réclamer l’organisation d’un véritable débat démocratique sur l’avenir du GPMM.