La justice condamne l’Etat et confirme l’illégalité de la campagne de démoustication de 2012

Depuis plusieurs années déjà, NACCICA et plusieurs autres associations environnementalistes dénoncent les campagnes de démoustication effectuées dans les Bouches-du-Rhône. Cette année encore, après quelques mois de tergiversation et une première annonce d’un arrêt des campagnes finalement démentie, un financement à hauteur de 700 000 € sera débloqué pour la démoustication de confort.

De nombreuses études scientifiques menées notamment en Camargue par la Tour du Valat, démontrent pourtant un impact environnemental de ces pratiques sur les sites Natura 2000 de Camargue, de la Crau, et des salines de l’Étang de Berre. Bien que revendiqué comme un « bio-insecticide » et inoffensif pour l’Homme par l’EID (Entente Interdépartementale pour la Démoustication), le Bacillus thurigiensis israelensis (Bti) n’est pas sans effet sur les milieux naturels et les écosystèmes traités chaque année. En effet, le Bti s’attaque aux larves de moustiques mais également à celles des chironomidés (moucherons, qui représentent des chaînons essentiels pour l’alimentation de nombreux animaux comme les libellules, les chauves-souris, les amphibiens ainsi que de nombreuses espèces d’oiseaux dont les hirondelles).

 

Afin de justifier l’utilisation de cette bactérie, et bien que les preuves scientifiques ne manquent pas pour affirmer qu’elle fragilise une partie de la faune, les pouvoirs publics agitent sans vergogne le chiffon rouge de la sécurité sanitaire et du développement touristique de la région. Là encore, la mauvaise foi et les confusions sont au rendez-vous, car le risque sanitaire reste minime et les touristes investissaient la Camargue bien avant une quelconque démoustication. Selon certaines hypothèses, la présence des espèces de moustiques autochtones y freinerait même l’arrivée d’espèces exogènes, telles que le fameux moustique-tigre vecteur de nombreuses maladies.
Pour dénoncer l’absence de prise en compte d’incidences environnementales significatives sur les objectifs de conservation de sites Natura 2000 provoquées par ces démoustications, NACICCA a demandé l’annulation des arrêtés préfectoraux autorisant les campagnes de démoustication en 2012, 2013 et 2014. Concernant la campagne de 2012, après avoir été débouté en première instance par le Tribunal administratif de Marseille en octobre 2014, NACICCA, rejointe par FNE PACA, a finalement obtenu gain de cause le 2 juin dernier devant la Cour administrative d’appel d’Aix-en-Provence. Comme les associations le soutenaient depuis le début, la Cour a considéré que la campagne de démoustication menée en 2012 était bien soumise à une évaluation des incidences Natura 2000, et que celle sur laquelle s’était initialement fondé le Préfet des Bouches-du-Rhône était largement insuffisante.

 

Cette décision de justice confirme donc l’illégalité de cette campagne et condamne l’État. Elle démontre que ce dernier a tout fait pour minimiser l’impact de la démoustication en Camargue et en Crau et contourner les réglementations européennes sur les études d’incidence en zone Natura 2000. Maintenant que les faits ont été reconnus, espérons que les décideurs et les élus finissent par réviser leur position.

 

Pour autant, nous ne sommes pas adeptes des piqûres de moustiques … Nos associations plaident seulement pour un arrêt total des traitements en milieu naturel qui, en plus de leur coût considérable, restent peu efficaces pour le confort des habitants compte tenu de leur rayon d’action limité. Les efforts sont en effet concentrés de manière disproportionnée sur les espaces naturels autour des villages de Salin-de-Giraud et de Port-St-Louis-du-Rhône, à fort enjeu touristique et faciles à traiter d’un point de vue méthodologique, alors que le reste du territoire est ignoré. Nous soutenons à l’inverse le développement de méthodes urbaines plus adaptées, telles que la distribution et l’installation de pièges anti-moustiques autour de l’ensemble des mas et des villages de Camargue. Les bornes anti-moustiques (bam) ont d’ailleurs déjà fait preuve de leur efficacité l’été dernier au Sambuc avec une diminution de la nuisance de plus de 80 %, ce qui permettrait un coût pour la collectivité publique et des incidences environnementales bien moindres.

 

Article tiré de la lettre d’information n°12, disponible au format PDF dans la rubrique lettres d’information

EN SAVOIR +

La page facebook « le moustique du sambuc » permet de s’informer sur les bam, ses résultats et mieux connaitre les impacts du bti

Vous pouvez retrouver les résultats de l’étude menée par la Tour du Valat sur son site internet, dans la lettre d’information n°13 (Mars 2013) – Actualité, Actu 1